Buffy the Vampire Slayer (TV)

ou un Hymne à la Liberté

Je tiens ici à présenter mes plus vifs remerciements à Joss Whedon et son équipe qui m’ont donné la possibilité de voir l’une des plus belles séries de télévision jamais réalisée. Une série fantastique, profondément métaphorique, qui traite du passage de l'enfance à l'âge adulte et qui fait appel à ce qu’il y a de meilleur en l’humanité, par le courage, le pardon, la rédemption et la liberté.

En cas d’erreur ou omission flagrante dans cet article, moi seul en suis responsable. Que les fans me pardonnent...

"Slayers. Everyone of us. Make your choice. Are you ready to be strong?" - Buffy Anne Summers

Lors des débuts de cette série créée en 1997, seuls 12 petits épisodes sont écrits par Joss Whedon, producteur, scénariste et réalisateur.

L'idée à la base de la série vient d'un navet, une série Z abominable apparue malheureusement au cinéma 5 années auparavant, un film fauché mis en scène avec les pieds, avec une actrice principale incroyablement mauvaise, des trucages et des maquillages d'un ridicule sans nom. Excusez-moi si je m'énerve, mais il y avait de quoi ! S'il y a bien un truc que je veux oublier, c'est la vision de cet objet cinématographique absolument impardonnable.

Quoique...

En effet, ce qui ne m'avait absolument pas convaincu sur grand écran, et pour cause, devint un pur joyau de la télévision. Par quel miracle fut-ce possible?

Car, voici une jeune fille sortant à peine de l'adolescence portant le nom d'Anne Summers et surnommée Buffy (ce qui donne en français courant : Bichette !!!) qui arrive, avec sa mère Joyce, fraîchement divorcée, à Sunnydale, une petite ville de Californie qui a l'infortune d'être placée sur la Bouche de l'Enfer. Et Buffy, toute mince, du haut de son 1,65m et de ses seize petites années va se coltiner tous les pires monstres existants sur Terre, en particulier les vampires, et faire face à, au moins, trois fins du monde.

Un synopsis à priori bien faible pour une série sans vraies vedettes à part son actrice principale, faisant même appel à des débutants comme David Boreanaz, dans le rôle majeur d'Angel, vampire charismatique, dont la seule précédente apparition notable, environ deux minutes, était dans un épisode de la série comique "Married... with children" (Mariés, deux enfants). Pourtant, l'ensemble du casting s'avèrera extraordinaire, en particulier grâce à deux magnifiques actrices : Sarah Michelle Gellar qui tient le rôle titre et Alyson Hannigan dans le rôle de Willow Rosenberg. Et toutes les idées de Whedon, qui avaient si lamentablement échoués au cinéma, purent se libérer sur le petit écran avec une maîtrise et une redoutable efficacité.

La série

Insouciance

A part peut-être le sixième épisode qui n'a pas ma préférence, cette première saison aligne une série d'histoires qui met en place solidement l'univers de Sunnydale, et pose les bases de tous les personnages. Le superbe épisode 11 aura ainsi un écho lors de la quatrième saison par la présence de l'Initiative. Enfin, le dernier épisode "1-12 Prophecy girl" où, malgré son jeune âge, Buffy doit faire face à sa propre mortalité. Devant Angel, son échange avec Giles dans la bibliothèque est le vrai point de départ de la série. Quand elle décide d'affronter, seule, le Maître, ce n'est pas de la résignation, mais son courage qui lui permet d'accepter son destin. Mais le squelette du Maître ne tombe pas en poussière...

Les 12 premiers épisodes ayant produit leur magie, la série allait pouvoir continuer pendant 6 saisons supplémentaires.

Résumons et anticipons l'évolution des personnages. Ainsi, Buffy devient malgré elle l'Elue, la Tueuse qui a pour mission de sauver l'Humanité, et elle rencontre un beau vampire, Angel, connu aussi sous le terrible nom d'Angelus. Sa meilleure amie Willow, une vraie nunuche, vrai cœur d'artichaud, devient la plus puissante sorcière ayant jamais foulé le sol de notre planète. Son ami, Alexander Harris (Nicholas Brendon), un vrai loser, bref un type ordinaire, soulève des montagnes pour elle. Cordelia Chase, sa gentille ennemie intime, jouée superbement par Charisma Carpenter, sacrifie tout pour elle. Son mentor, Rupert Giles (Anthony Stewart Head), devient un père de substitution qui la trahira. Apparaît également une sœur de 14 ans, Dawn (Michelle Trachtenberg), qui est la Clé de l'équilibre de l'Univers. Une autre Tueuse, Faith (Eliza Dushku) la rejoint dans son combat... à sa façon. Tara McLay (Amber Benson), l'amour de Willow, est une perle resplendissante de bonté. Jenny Calendar (Robia La Morte), une bohémienne, accompagne Giles dans ses recherches. Malgré ses actions passées alors qu'elle s'appelait Anyanka, une démone attendrissante (Emma Caulfield) amène une belle humanité au groupe. Un autre vampire Spike (James Marsters), accompagné de Drusilla (Juliet Landau), ou encore de Darla (Julie Benz), essaie sans succès d'abattre la Tueuse. Je pourrais encore continuer avec Joyce (Kristine Sutherland), Snyder (Armin Shimerman), Wesley Wyndham Price (Alexi Denisof), Harmony (Mercedes McNab), Oz (Seth Green), Riley Finn (Mark Blucas), Jonathan (Danny Strong), le Maire Wilkins (Harry Groener), le Maître (Mark Metcalf), ... et j'en oublie...

La raison du succès de la série vient de l'effarante capacité de Joss Whedon à placer des détails dans son histoire qui ne feront écho que quelques années plus tard, et à toujours retomber sur ses pieds. Il sait également créer des personnages secondaires extraordinaires campés par des actrices comme Juliet Landau - Drusilla, la belle vampire perdue -, et des acteurs comme Armin Shimerman, qui se jettent dans leur rôle avec une totale jubilation. L'histoire évolue à chaque saison, voire même au milieu de certaines saisons, avec des retournements de situations brutaux et déchirants, car Whedon est un scénariste qui sait aussi tuer ses personnages avec classe.

Voici maintenant les faits marquants de la geste épique de Buffy et de ses amis.

Amours

Dès son début, la deuxième saison commence à montrer que le côté joyeux et superficiel de la première va aller vers la tragédie, en faisant évoluer ses personnages assez radicalement au risque de choquer. "2-04 Inca mummy girl" montre que le destin peut broyer n'importe quelle personne, même pétrie de bonnes intentions. Les épisodes "2-09" et "2-10" permettent d'en savoir un peu plus sur la grande lignée des Tueuses. Vers la fin de la saison, les personnages sont bien différents. Suite à l'apparition d'Angelus, l'épisode "2-17 Passion" est la charnière de la série avec la mort brutale de Janna. Les relations entre Giles et Buffy ne seront plus jamais les mêmes. Tout devient possible, et Whedon va dorénavant nous malmener. Ainsi, l'alliance contre nature avec Spike, prélude à tant de choses; la révélation de Buffy à sa mère sur sa nature de Tueuse, et la réaction de Joyce, tellement réaliste; et la disparition d'Angel, Buffy étant obligée de sacrifier l'homme qu'elle aime. L'incompréhension sur le visage d'Angel est également nôtre, aussi acérée que la pointe de l'épée qu'elle lui plante dans le coeur.

Conscience

Anya fait une apparition remarquée grâce à Cordelia et va créer quelques remous dans le groupe. Faith, la Tueuse rebelle est un miroir aux états d'âmes de Buffy ainsi qu'aux autres membres du Scooby-Gang. L'épisode réjouissant "3-06 Band candy" permet d'allèger l'atmosphère, mais nous fait découvrir les manœuvres du Maire Wilkins. Les épisodes suivants redeviennent, très vite, bien sombres grâce au talent d'Eliza Dushku. Une nouvelle pause humoristique avec "3-16 Doppelgangland" où Alyson Hannigan permet à Willow de s'émanciper. Mais la trahison s'étend, et les faiblesses humaines sont montrées avec réalisme. L'innocence de l'enfance est bien loin lors de la remise des diplômes.

Combats

Une saison un peu anarchique (Joss Whedon dixit) et plus faible que les autres, avec l'apparition de deux nouveaux personnages Riley Finn, et surtout Tara McLay qui permettra de mettre en avant un couple de lesbiennes sans tomber dans aucune caricature. Quelques bonnes surprises avec des épisodes extraordinaires comme le "4-10 Hush" aux étonnants gentlemen aphones, les deux épisodes avec le retour de Faith "4-15 This year's girl, 4-16 Who are you?" dont une phrase est lourde de sens, et l'épisode décalé avec Jonathan "4-17 Superstar" où est imaginé un monde sans Buffy. Le final onirique "4-22 Restless", le 100ème épisode de la série, aux longues scènes contemplatives, permet de rencontrer la première Tueuse, d'entrer dans le subconscient de nos héros, d'annoncer l'arrivée de Dawn et de montrer la part de démon qui sommeille en Buffy.

Destin

Arrivent dans cette saison de vrais chefs d'œuvres, dépassant de très loin ce que l'on peut voir au cinéma.

Ainsi, le dernier épisode sacrificiel "5-22 The gift", où le fabuleux geste de Buffy, marque d'amour absolu envers sa sœur, envers l'humanité toute entière, me laissa en état de choc. Je me rappelle encore qu'il me fallut cinq bonnes minutes pour émerger de ma stupeur et pour accepter ce que je venais de voir : l'inacceptable.

Mais le plus bel épisode de la saison, le diamant de toute la série, est celui qui vient du cœur de Whedon, de sa propre vie, de sa chair, qu'il a écrit et réalisé. Un épisode traumatisant qui m'a assommé par sa maîtrise, sa justesse et son humanité. Je parle bien sûr du "5-16 The body". Le montage est différent de tous les autres épisodes. Nous avons droit, dans un silence assourdissant, à des plans séquences étouffants magnifiquement interprété par Sarah Michelle Gellar, habillée de rouge sang. Elle est accompagnée dans sa douleur par Michelle Trachtenberg, et surtout Emma Caulfield dont le personnage, Anya, énonce une vérité terrible. Impossible de s'échapper devant le pire qui puisse arriver à tout être humain, la mort d'un être aimé. La mort de Joyce. D'une dureté terrifiante, cet épisode vous prend aux tripes. Le tout dernier plan fait preuve d'une audace démentielle, alors vous êtes définitivement convaincu que Joss Whedon est un homme qui n'a jamais pris et ne prendra jamais les spectateurs pour des imbéciles.

Désespoir

Buffy revient encore plus désespérée, et le Scooby-Gang se délite jusqu'à la merveilleuse comédie musicale "6-07 Once more with feeling", scénario, paroles, musique et réalisation encore par Whedon, qui permet de relancer avec brio toutes les relations entre les personnages et de faire tomber dramatiquement les masques. Dans cet épisode, l'image est extraordinaire de poésie, tous les acteurs dansent et chantent, et démontrent leur talent. Sarah Michelle Gellar assume son rôle de meneuse de revue avec une énergie pleine de rage à l'image de son personnage déchiré, Emma Caulfield explose les lapins, James Marsters rocke l'amour de Spike comme un fou, Michelle Trachtenberg danse l'adolescence de Dawn avec grâce, Anthony Steward Head nous donne une balade bouleversante, Nicholas Brendon fait le guignol avec aplomb, Alyson Hannigan murmure le désespoir de Willow, et Amber Benson nous emballe la chanson d'amour de Tara d'une voix fabuleuse.

L'épisode "6-12 Doublemeat Palace" détend joyeusement l'atmosphère en vous dégoûtant assez durablement d'une certaine mal-bouffe ricaine que l'on mange rapidement...

Un autre épisode dynamite toute la série, c'est le "6-17 Normal again". Tous les repères de la série s'effondrent quand nous voyons Buffy dans un hôpital psychiatrique, où des pans entiers de la réalité se déchirent dans son esprit, oscillant entre une vie d'humaine normale qu'elle refuse et celle d'une Tueuse qu'elle ne souhaite plus être. Le dernier plan de l'épisode, donnant potentiellement un sens totalement inédit à l'ensemble de la série, est à ce titre une perfection qui choqua et qui choquera encore longtemps n'importe quel spectateur.

Liberté

La série arrive à son terme avec la septième saison. L'adolescente Buffy, à l'instar de son interprète, est devenue une femme. Tout être humain souhaite avoir le contrôle sur sa vie. Hors, à la fin de la sixième saison, tous nos personnages sont "détruits" par la puissance d'un destin qui les dépasse. Buffy est lasse de tous ses combats, de sa solitude et de sa relation avec William. Willow a tout perdu et est devenue un monstre après avoir brisé un tabou : le meurtre ignoble, de sang froid, d'un être humain. Xander est redevenu un loser. Dawn ne sait quel sens donner à sa vie. Giles a compris que son temps est révolu.

Le mythe se met alors en place avec une succession de révélations spectaculaires, pleines de passion, de culpabilité, d'amour, de souffrance et d'héroïsme.

Dans cette saison finale, le ou les méchants sont secondaires et ne servent qu'à révéler le retour du courage dans le cœur de tous nos héros. De nouvelles facettes de leur caractère sont développées, concluant leur évolution au fil de ces sept années.

Toutes les actrices et tous les acteurs du Scooby-Gang se surpassent. Sarah Michelle Gellar permet à Buffy d'accepter enfin son destin et de le dépasser. Emma Caulfield montre qu'Anya est trop humaine. Faith revient plus attachante que prévu. Spike est grandi par ses remords et sa conscience. Et surtout, Alyson Hannigan, Willow, qui est définitivement capable de donner à la caméra des sentiments intenses de justesse.

La sincérité et la simplicité de cette dernière saison nous emmènent vers le déchirant final.

Le progressisme et le féminisme sous-jacents de la série explosent avec l'arc narratif ultime, qui révèle que ce ne sont pas les Tueuses qui ont besoin des Observateurs, mais l'inverse ("7-15 Get it done"). En effet les premiers Observateurs, ceux-là même qui ont engendré la Tueuse originelle, loin d'avoir voulu l'assister et l'aider dans sa mission, ont en fait perverti l'âme de cette première guerrière préhistorique en permettant à un démon de fusionner avec elle, afin qu'elle accomplisse la tâche qu'ils ne pouvaient assumer eux-mêmes, faibles hommes : la lutte éternelle contre le Mal dévastant la Terre, mère nourricière de toute vie.

Comprenant que tout au long de ces années elle n'avait pas eu le contrôle sur son destin, Buffy refuse ce viol. Elle refuse qu'il n'y ait qu'une seule Tueuse par génération. Elle partage sa Force et provoque la transformation de toutes les Potentielles en Tueuses. Une armée de Tueuses vient d'apparaître sur la surface de la Terre entière. Buffy a souvent sauvé le monde. Maintenant, elle le change.

A l'écran, le spectacle est total et après avoir ouvert la Bouche de l'Enfer, Buffy et ses Potentielles vont au devant d'une armée de milliers de Turok-Han, les ancètres des vampires, prêts à se répandre sur le monde. Les Tueuses étant submergées par le nombre, Buffy fait appel à Spike qui se met à rayonner tel un soleil et réduit en poussière l'ennemi. Et Sunnydale s'effondre dans le cataclysme qui referme la Bouche de l'Enfer.

Giles a accepté de n’être plus qu’un témoin.
Anya meurt l'épée à la main en combattant aux côtés de ses amis humains.
Faith, la Tueuse torturée, s'accepte et s'aime enfin.
Dawn achève son évolution, n'être qu'une simple humaine.
Spike s'est sacrifié en donnant un sens à sa vie.
Xander n'est plus le gamin insouciant, mais un homme.
Willow devient une déesse, elle est la Mère.
Buffy accepte enfin sa condition de Tueuse en devenant la femme qu'elle souhaitait être. Ainsi, elle accomplit sa mission, en s'en libérant, en partageant sa charge de Tueuse.

La toute dernière image montre Buffy Anne Summers radieuse, sûre d'elle.
Elle est, pour la première fois, confiante en l'avenir.

Elle est libre.

Au sujet de "Buffy contre les vampires" en VF

La VF peut donner l'impression que la série "Buffy contre les vampires" est débile et uniquement destinée à un public d'ados attardés (comme si tous les ados du monde étaient attardés...) à cause de dialogues modifiés, édulcorés et rendus complètement stupides, voire transformés en tirades carrément dangereuses. Ce qui peut provoquer, à juste raison, la peur chez certains parents. Pour bien comprendre ma colère, et ici je tiens à remercier Martin Winckler pour sa science, je vais détailler mon propos.

Accrochez-vous, ça va balancer, car je déteste être pris pour un con.

Tous les amateurs de films étrangers savent que le mouvement des lèvres est difficile à synchroniser pour les doubleurs, et qu'il est nécessaire d'adapter les dialogues; jusque-là, pas de problème. Mais c'est le changement de sens des dialogues qui est dérangeant.

Peu de dialogues sont véritablement intraduisibles dans la série. Les personnages sont souvent en mouvement, filmés de dos, de loin, ce qui réduit d'autant le problème de la post-synchronisation. Et pourtant, un nombre incalculable de scènes présentent des dialogues dénaturés totalement, pris à contresens, édulcorés ou au contraire stupidement aggravés.

Premier exemple, limite

Lors de la rencontre entre les parents et les professeurs au lycée dans "2-03 School hard", Buffy y essaie d'éviter que sa mère ne croise le Principal Snyder :

En VO
Snyder: Was that your mother?
Buffy: Here.
Elle lui donne du punch mais renverse le verre sur lui.
Buffy: Oh! Oh, sorry! Um, yeah! Yeah, I was gonna introduce you, but, um, she wouldn't have said much. Y'know, she doesn't speak a word of English.

En VF
Snyder : C'était votre mère ?
Buffy : Oui tenez !
Elle lui donne du punch mais renverse le verre sur lui.
Buffy : Oh je suis désolée. Oui, oui c'est elle ! J'aurais voulu vous la présenter mais je ne sais pas si elle aurait été très bavarde. Je crois qu'elle est impressionnée par les hommes petits et chauves, ça la bloque.

Dans la VF, Buffy dit méchamment à Snyder que sa mère a peur des petits chauves et lorsque enfin Snyder rencontre Joyce, il lui dit de la suivre si elle n'a rien contre les petits chauves. Alors qu'en VO, Buffy dit en blaguant à Snyder que sa mère ne parle pas anglais, et lorsque Snyder la rencontre, il demande simplement à Joyce de le suivre!

Autre exemple, cette fois-ci beaucoup plus grave et insidieux

Avertissement : âmes sensibles, s'abstenir de lire le paragraphe suivant.
Dans un autre épisode où Spike dit à Drusilla dans la VF, qu'ils vont faire la fête et elle lui répond "Oh oui, une fête avec des jeunes vierges que je pourrais enchaîner", alors que dans la VOST, elle répond "Oh oui, une fête avec des confettis et des serpentins" ! Ainsi, les jolis serpentins deviennent par la magie impardonnable de la "traduction" des vierges enchaînées, ce qui transforme Drusilla, la petite fille cruelle et innocente en un monstre sadique pur et simple, alors que tout l'intérêt du personnage réside dans cette oscillation constante entre l'innocence de l'enfance et la barbarie la plus totale. Quant on voit l'extraordinaire talent de Juliet Landau, la force et la sensibilité qu'elle a mis pour créer le personnage de Drusilla, une telle manipulation du sens est proprement criminelle.

De même, la très grande majorité des jeux de mots et des blagues à allusions sexuelles passent à la trappe. Le vocabulaire du Scooby-Gang apparaît peu, et les clins d'oeil entre certains épisodes disparaissent (les crayons jaunes de Willow sur les saisons 5 et 6 en sont un autre exemple). Cela entraîne une "débilisation" de la série, et pervertit le caractère de certains personnages.

Une doubleuse s’occupera même successivement de la voix de Jenny Calendar (la rendant niaise), puis de l’amie de Giles, sans faire le moindre effort de travail sur sa voix. Un résultat choquant à l’oreille.

La répétition systématique de ces incohérences dans l'adaptation - à se demander si elles ne sont pas volontaires - en fait une série très différente de ce qu'elle est, à l'origine, en VO. Ainsi, cette série fantastique devient à la fois plus lisse, mais aussi pernicieuse, voire dangereuse, en supprimant les multiples facettes des caractères des personnages, les rendants ainsi plus manichéens. Une partie de la richesse de la série vient de ses personnages complexes, car rien n'est simple dans l'univers de Buffy. Toute cette complexité, cette poésie, cette âme est perdue, pervertie, comme si le spectateur français, y compris adolescent, n'était pas capable de comprendre le propos initial, ni d'assimiler les nombreuses références et images qui l'illustrent. Bref, le spectateur est vraiment méprisé et pris pour un con, par des chaînes de télévision françaises qui sont aux ordres de pouvoirs financiers (voir la célèbre tirade de Patrick Le Lay au sujet du temps de cerveau...) qui décident de ce que les spectateurs peuvent voir, en gommant tout ce qu'ils considèrent à tort comme subversif. Il serait, en effet, dangereux que le téléspectateur français se mette à utiliser ses neurones et à penser...

Regardez aussi de quelle façon ont été traduits les titres des épisodes. C'est vraiment n'importe quoi.

Pour conclure...

... et je vais essayer de rester poli, bien que la colère commence à légèrement m'étouffer, je ne m'étendrai pas trop sur l'épisode musical qui, malgré les efforts - louables ? - des doubleurs qui ont fait leur "boulot", fut totalement massacré en nous privant de la performance originale de tous les acteurs et surtout de la merveilleuse voix d'ange d'Amber Benson. A pleurer...

La série "Buffy the Vampire Slayer" doit donc être vue, impérativement et seulement, en VO avec les sous-titres.

Au sujet des séries TV américaines...

... Martin Winckler a donné une passionnante conférence à l'Université de tous les Savoirs en Juillet 2004 ( sa retranscription de 109mn est accessible sur le site : http://www.canal-u.education.fr/canalu/affiche_programme.php?vHtml=0&programme_id=555073540 ). Un passage vers les 80mn illustre le propos précédent. Martin Winckler y décrit le travail des doubleurs français sur la série "Buffy the Vampire Slayer" en termes bien sentis.

Yabaar, le 30 juin 2005.