I, Robot (2004) - Alex Proyas

Asimov adapté au cinéma ?

I,Robot, grâce à son scénario totalement original et éloigné des écrits du grand Isaac Asimov, est bien une adaptation des nouvelles et romans d'Asimov contant les aventures et l'évolution de ses robots obéissant aux 3 lois de la robotique - que je ne citerai pas ici, car elles sont top-secrètes.

Avant de parler de l'adaptation des thèmes d'Asimov, parlons du film. On y retrouve la virtuosité d'Alex Proyas, que ce soit la mise en scène ou la direction d'acteurs, que l'on avait pu admirer dans ses 2 films précédents, The Crow, et surtout Dark City. La tension dramatique, avec une sensation d'étouffement, de paranoïa, est réellement présente. Les deux acteurs principaux sont excellents, Bridget Moynahan (Dr Susan Calvin) et Will Smith (Del Spooner) en particulier qui trouve là, probablement, son meilleur rôle à ce jour. Film à effets spéciaux par excellence, ceux-ci ont le bon goût de ne pas s'imposer exagérément et sont, au contraire, un support à l'histoire.
Evidemment, il s'agit également d'un film d'action et les morceaux de bravoure ne manquent pas - la poursuite à grande vitesse entre Spooner et deux transports bourrés de robots pas gentils est superbe. Enfin, la conclusion du film est pleine de poésie - pas facile vu le type de film - et là encore, c'est à porter au crédit d'Alex Proyas qui avait réalisé cet exploit dans Dark City.
Mais surtout, les trois lois de la robotique, ainsi que la loi secrète, sont présentées avec brio. Si ce film ne devait avoir qu'un seul mérite, ce serait déjà celui-là : amener les ignorants à Isaac Asimov et les encourager à lire ses livres.

Les nouvelles et romans de robots d'Asimov sont nombreux et englobent également, en se fusionnant, son autre cycle Fondation. Pour résumer son oeuvre littéraire « robotique », ce qui est impossible - mais essayons quand même - Isaac Asimov décrit comment les robots, machines limitées par l'Homme, deviendront au fil des siècles des créatures douées de conscience, car à un moment de leur évolution, ils accèdent à une nouvelle loi, la loi « Zéro ».

Sonny est animé par la loi « Zéro ». Il possède en effet un libre arbitre, obtenu grâce à ses rêves. En effet, son « père » l'a programmé pour lui permettre de rêver. Comme le cerveau humain qui, pendant le sommeil paradoxal, classe les émotions, sensations et souvenirs, créant donc la conscience, Sonny peut apprendre et à terme faire ses propre choix. Et c'est grâce à Susan Calvin qu'il fera son choix final, devenant le premier androïde.

Vicki est malheureusement guidée par la loi « Zéro inverse ». Premier cerveau positronique créé, donc imparfaitement - la perfection n'existe pas - elle peut apprendre, mais basiquement, sans capacité de choix. Elle ne peut qu'analyser et faire un traitement binaire de ses données. Obéissant à sa programmation originelle, et déviante, elle supprime le libre arbitre des humains. Elle cherche à faire le bien de l'Humanité à son niveau ultime, mais elle ne sait pas ce qu'est le libre arbitre. Elle n'enfreint donc à aucun moment les 3 lois, mais elle ne peut détecter que son raisonnement est erroné (ce type de comportement est l'un des moteurs de certaines nouvelles d'Asimov).

Assez paradoxalement, on voit le parcours de la froide Susan Calvin, qui s'humanise au long du film, car elle perd ses certitudes, tandis que l'incrédule Spooner accepte l'impossible et son propre état de cyborg.

Le film possède une richesse inattendue et peut donc être vu à plusieurs niveaux. Pas si mal pour une « adaptation ».

Yabaar, le 9 août 2004.